Un jour, une réforme dans l'Église chrétienne pourrait avoir un impact assez profond pour revenir aux purs enseignements religieux de Jésus, source et aboutissement de notre foi. On peut prêcher une religion à propos de Jésus, mais obligatoirement, on doit vivre la religion de Jésus. Dans l'enthousiasme de la Pentecôte, Pierre inaugura involontairement une nouvelle religion, la religion du Christ ressuscité et glorifié. L'apôtre Paul transforma plus tard ce nouvel évangile en christianisme, religion où il incorpora ses propres vues théologiques et décrivit sa propre expérience personnelle avec le Jésus de la route de Damas. L'évangile du royaume est fondé sur l'expérience religieuse personnelle de Jésus de Galilée; le Christianisme est fondé presque exclusivement sur l'expérience religieuse personnelle de l'apôtre Paul. Presque tout le Nouveau Testament est consacré non à décrire la vie religieuse significative et inspirante de Jésus, mais à analyser l'expérience religieuse de Paul et à décrire ses convictions religieuses personnelles. Les seules exceptions notables à cette affirmation, à part certains chapitres de Matthieu, de Marc et de Luc, sont le Livre des Hébreux et l'Épitre de Jacques. Même Pierre ne revint qu'une fois dans ses écrits sur la vie religieuse personnelle de son Maitre. Le Nouveau Testament est un superbe document chrétien, mais ne reflète que piètrement la religion de Jésus.
La vie de Jésus dans la chair dépeint une croissance religieuse transcendante, commençant par les idées anciennes de crainte primitive et de respect humain, continuant par des années de communion spirituelle personnelle et parvenant finalement au statut supérieur et exalté de la conscience de son unité avec le Père. Ainsi, en une seule courte vie, Jésus franchit l'expérience de la progression spirituelle religieuse que les êtres humains commencent sur Terre et n'achèvent généralement qu'à la fin de leur long séjour dans les écoles d'éducation spirituelle des niveaux successifs de la carrière pré-paradisiaque. Jésus progressa à partir d'une conscience purement humaine des certitudes de la foi, fruit de l'expérience religieuse personnelle, jusqu'aux hauteurs spirituelles sublimes de la réalisation positive de sa nature divine et jusqu'à la prise de conscience de son association étroite avec le Père Universel dans la direction d'un univers. Il progressa depuis l'humble statut de dépendance humaine, qui l'avait incité à répondre spontanément à l'interlocuteur qui l'appelait Bon Maitre : “ Pourquoi m'appelles-tu bon ? Nul n'est bon sinon Dieu, ” jusqu'à la conscience sublime de sa divinité parachevée, qui le conduisit à s'écrier : “ Qui d'entre vous me convaincra de péché ? ” Et cette ascension progressive de l'humain au divin fut purement l'accomplissement d'un mortel. Et, lorsque Jésus eut ainsi atteint la divinité, il était encore le même Jésus humain, le Fils de l'Homme aussi bien que le Fils de Dieu.
Marc, Matthieu et Luc gardent quelque chose du portrait du Jésus humain se lançant dans la magnifique lutte pour connaître la volonté divine et pour exécuter cette volonté. Jean présente un portrait du triomphant Jésus marchant sur Terre avec la pleine conscience de sa divinité. La grande erreur commise par ceux qui ont étudié la vie du Maitre est que certains ont conçu Jésus comme entièrement humain, tandis que d'autres l'ont imaginé comme uniquement divin. Durant toute son expérience, il fut véritablement à la fois humain et divin, comme il l'est encore maintenant.
Mais la plus grande erreur consista en ceci : Alors que le Jésus humain était reconnu comme ayant une religion, le Jésus divin (le Christ) devint une religion presque du jour au lendemain. Le christianisme de Paul assura l'adoration du divin Christ, mais perdit à peu près complètement de vue le Jésus humain de Galilée luttant vaillamment et qui, par la vaillance de sa foi religieuse personnelle et l'héroïsme de son Ajusteur intérieur, s'éleva des humbles niveaux de l'humanité pour devenir un avec la divinité, devenant ainsi le chemin nouveau et vivant par lequel tous les mortels peuvent effectuer la même ascension depuis l'humanité jusqu'à la divinité. Les mortels, à tous les stades de spiritualité et sur tous les mondes, peuvent trouver dans la vie personnelle de Jésus ce qui les fortifiera et les inspirera pendant qu'ils progressent des niveaux spirituels les plus bas aux valeurs divines les plus élevées, depuis le commencement jusqu'à la fin de toute expérience religieuse personnelle.
À l'époque où fut écrit le Nouveau Testament, les auteurs croyaient profondément non seulement à la divinité du Christ ressuscité, mais ils croyaient aussi pieusement et sincèrement à son retour immédiat sur Terre pour parfaire la fraternité spirituelle. Cette foi solide dans le retour immédiat du Seigneur contribua beaucoup à faire omettre, dans le récit, les références qui dépeignaient les expériences et les attributs purement humains du Maitre. Tout le mouvement chrétien eut tendance à s'écarter du portrait humain de Jésus de Nazareth pour s'orienter vers l'exaltation du Christ ressuscité, le Seigneur Jésus-Christ glorifié qui devait bientôt revenir.
Jésus fonda la religion de l'expérience personnelle en faisant la Volonté de Dieu et en servant la fraternité humaine. Paul fonda une religion où Jésus glorifié devenait l'objet d'adoration, et où la fraternité se composait de compagnons croyant au divin Christ. Ces deux concepts existaient potentiellement dans la vie divine-humaine de Jésus durant son effusion, et il est vraiment dommage que ses disciples n'aient pas réussi à créer une religion unifiée qui aurait dument reconnu à la fois la nature humaine et la nature divine du Maitre, telles qu'elles étaient inséparablement liées dans sa vie terrestre et si glorieusement exposées dans l'évangile originel du royaume.
Vous ne seriez ni choqué ni troublé par certaines vigoureuses proclamations de Jésus si vous vouliez seulement vous rappeler qu'il était l'être humain religieux le plus sincère et le plus dévoué du monde. Il était un mortel entièrement consacré, voué sans réserve à faire la volonté de son Père. Beaucoup de ses sentences apparemment dures représentaient plutôt une profession personnelle de foi et un engagement de dévotion que des commandements à ses disciples. Et ce furent précisément cette unité de dessein et sa dévotion désintéressée qui lui permirent de faire, en une courte vie, des progrès aussi extraordinaires dans la conquête du mental humain. Beaucoup de ses déclarations devraient être considérées comme des confessions de ce qu'il exigeait de lui-même plutôt que comme des exigences imposées à tous ses disciples. Dans sa dévotion à la cause du royaume, Jésus brula tous les ponts derrière lui; il sacrifia tout ce qui était un obstacle à l'exécution de la volonté de son Père.
Jésus bénissait les pauvres parce qu'ils étaient généralement sincères et pieux; il condamnait les riches parce qu'ils étaient généralement libertins et impies. Mais il condamnait aussi les pauvres quand ils étaient impies, et louait les êtres humains fortunés quand ils étaient pieux et consacrés.
Jésus amenait les êtres humains à se sentir chez eux dans le monde; il les délivrait de l'esclavage des tabous et leur enseignait que le monde n'est pas fondamentalement mauvais. Il n'aspirait pas à échapper à sa vie terrestre. Durant sa vie dans la chair, il maitrisa une technique pour faire la volonté de son Père d'une manière qui fut agréable à ce Père. Il atteignit une vie religieuse idéaliste au milieu d'un monde réaliste. Jésus ne partageait pas le point de vue pessimiste de Paul sur l'humanité. Le Maitre considérait les êtres humains comme fils et filles de Dieu et prévoyait un avenir éternel et magnifique pour tous ceux qui choisiraient de survivre. Il n'était pas un sceptique moral; il regardait l'être humain positivement et non négativement. Il considérait la plupart des êtres humains comme faibles plutôt que mauvais, désaxés plutôt que dépravés. Mais quel que fût leur statut, ils étaient tous les enfants de Dieu et ses frères et soeurs.
Il enseigna aux êtres humains à s'attribuer une haute valeur dans le temps et dans l'éternité. À cause de cette haute estime que Jésus avait pour les êtres humains, il était prêt à se dépenser au service assidu de l'humanité. Et c'était cette valeur infinie qu'il attribuait au fini qui faisait de la règle d'or un facteur essentiel de sa religion. Quel mortel ne serait pas soulevé par la foi extraordinaire que Jésus a en lui ?
Jésus n'offrit pas de règles pour le progrès social. Sa mission était religieuse, et la religion est une expérience exclusivement individuelle. Le but ultime de la société dans son accomplissement le plus avancé ne peut jamais espérer transcender la fraternité des êtres humains fondée sur la reconnaissance de la paternité de Dieu enseignée par Jésus. L'idéal de tout aboutissement social ne peut être réalisé que par la venue de ce royaume divin.
L'expérience religieuse personnelle, spirituelle, résout efficacement la plupart des difficultés des mortels; elle sélectionne, évalue et ajuste tous les problèmes humains. La religion n'écarte ni ne supprime les ennuis humains, mais elle les dissout, les absorbe, les illumine et les transcende. La véritable religion unifie la personnalité pour qu'elle s'ajuste efficacement à toutes les nécessités des mortels. La foi religieuse – la gouverne positive de la divine présence intérieure – permet infailliblement à l'être humain qui connaît Dieu de jeter un pont sur l'abime qui existe entre d'une part la logique intellectuelle qui reconnaît la Première Cause Universelle comme étant Cela, et d'autre part les affirmations positives de l'âme qui déclarent que cette première cause est Lui, le Père céleste de l'évangile de Jésus, le Dieu personnel du salut humain.
Il n'y a que trois éléments dans la réalité universelle : le fait, l'idée et la relation. La conscience religieuse identifie ces réalités en tant que science, philosophie et vérité. La philosophie aurait tendance à considérer ces activités comme la raison, la sagesse et la foi – la réalité physique, la réalité intellectuelle et la réalité spirituelle. Nous avons l'habitude d'appeler ces réalités choses, significations et valeurs.
La compréhension progressive de la réalité équivaut à s'approcher de Dieu. La découverte de Dieu, la conscience d'être identique à la réalité, équivaut à éprouver le parachèvement de soi – le soi entier, la totalité de soi. L'expérience de la réalité totale est la pleine réalisation de Dieu, la finalité de l'expérience de la connaissance de Dieu.
Le résumé complet de la vie humaine consiste à savoir que l'être humain est éduqué par le fait, ennobli par la sagesse et sauvé – justifié – par la foi religieuse.
La certitude physique consiste en la logique de la science; la certitude morale, en la sagesse de la philosophie; la certitude spirituelle, en la vérité de l'expérience religieuse authentique.
Le mental humain peut atteindre de hauts niveaux de clairvoyance spirituelle et les sphères correspondantes de divinité des valeurs, parce qu'il n'est pas entièrement matériel. Il existe un noyau d'esprit dans le mental de l'être humain – l'Ajusteur de la présence divine. Il y a trois preuves distinctes que cet esprit habite le mental humain :
La communion humanitaire – l'amour. Le mental purement animal peut être grégaire pour se protéger, mais seul l'intellect habité par l'esprit est généreusement altruiste et inconditionnellement aimant.
L'interprétation de l'univers – la sagesse. Seul le mental habité par l'esprit peut comprendre que l'univers est bienveillant pour les individus.
L'évaluation spirituelle de la vie – l'adoration. Seul l'être humain habité par l'esprit peut réaliser la divine présence et chercher à atteindre une expérience plus complète dans et avec cet avant-gout de divinité.
Le mental humain ne crée pas de valeurs réelles; l'expérience humaine ne procure pas la clairvoyance de l'univers. En ce qui concerne la clairvoyance, la récognition des valeurs morales et le discernement des significations spirituelles, tout ce que le mental humain peut faire consiste à découvrir, reconnaître, interpréter et choisir.
Les valeurs morales de l'univers deviennent des acquis intellectuels par l'exercice des trois jugements, ou choix fondamentaux, du mental des mortels :
Si un amant divin ne vivait pas en lui, l'être humain ne pourrait aimer généreusement et spirituellement. Si un interprète ne vivait pas dans son mental, l'être humain ne pourrait pas vraiment se rendre compte de l'unité de l'univers. Si un estimateur ne demeurait pas en lui, l'être humain serait dans l'impossibilité d'apprécier les valeurs morales et de reconnaître les significations spirituelles. Or, cet amant divin vient de la source même de l'amour infini; cet interprète est une fraction de l'Unité Universelle; cet estimateur est l'enfant du Centre-Source de toutes les valeurs absolues de la réalité éternelle et divine.
L'évaluation morale avec une signification religieuse – la clairvoyance spirituelle – implique le choix individuel entre le bien et le mal, la vérité et l'erreur, le matériel et le spirituel, l'humain et le divin, le temps et l'éternité. La survie humaine dépend, dans une grande mesure, de la consécration de la volonté humaine à choisir les valeurs triées par le sélecteur des valeurs spirituelles – l'interprète et l'unificateur intérieur. L'expérience religieuse personnelle comporte deux phases : la découverte dans le mental humain, et la révélation par le divin esprit intérieur. Par un excès de raisonnements sophistiqués ou par suite de la conduite impie de personnes prétendument religieuses, il se peut qu'un être humain, ou même une génération d'êtres humains suspende ses efforts pour découvrir le Dieu qui les habite; ces êtres humains peuvent cesser de progresser et ne pas aboutir à la révélation divine. Mais de telles attitudes dépourvues de progrès spirituel ne peuvent durer longtemps à cause de la présence et de l'influence des Ajusteurs de Pensée.
Cette profonde expérience de la réalité de la présence divine intérieure transcende pour toujours la grossière technique matérialiste des sciences physiques. On ne peut ni mettre la joie spirituelle sous un microscope, ni peser l'amour dans une balance, ni mesurer les valeurs morales; et l'on ne peut pas non plus chiffrer la qualité de l'adoration spirituelle.
Les Hébreux avaient une religion de sublimité morale. Les Grecs élaborèrent une religion de beauté. Paul et ses confrères fondèrent une religion de foi, d'espérance et de charité. Jésus révéla une religion d'amour et en donna l'exemple : la sécurité dans l'amour du Père, avec la joie et la satisfaction résultant du partage de cet amour au service de la fraternité humaine.
Chaque fois qu'un être humain fait un choix moral réfléchi, il fait immédiatement l'expérience d'une nouvelle invasion divine de son âme. Le choix moral constitue la religion en tant que mobile de réaction intérieure aux conditions extérieures. Mais cette religion réelle n'est pas une expérience purement subjective. Elle signifie que l'ensemble subjectif de l'individu est engagé dans une réaction significative et intelligente à l'objectivité totale – à l'univers et à son Auteur.
Ce n'est pas parce que l'expérience exquise et transcendantale d'aimer et d'être aimé est si purement subjective qu'elle n'est qu'une illusion psychique. La seule réalité vraiment divine et objective qui soit associée aux êtres mortels, l'Ajusteur de Pensée, fonctionne apparemment, pour l'observation humaine, comme un phénomène exclusivement subjectif. Le contact de l'être humain avec Dieu, la réalité objective la plus haute, ne s'effectue que par l'expérience purement subjective de le connaître, de l'adorer et de réaliser la filiation avec lui.
La véritable adoration religieuse n'est pas un futile monologue où l'on se trompe soi-même. L'adoration est une communion personnelle avec ce qui est divinement réel, avec ce qui est la source même de la réalité. Par l'adoration, l'être humain aspire à devenir meilleur et, par elle, il finit par atteindre le meilleur.
L'idéalisation de la vérité, de la beauté et de la bonté, et la tentative de les servir ne sont pas un substitut à l'expérience religieuse authentique – la réalité spirituelle. La psychologie et l'idéalisme ne sont pas l'équivalent de la réalité religieuse. Les projections de l'intellect humain peuvent, il est vrai, donner naissance à de faux dieux – des dieux à l'image de l'être humain – mais le fait d'avoir véritablement conscience de Dieu n'a pas cette origine; la conscience de Dieu réside dans l'esprit intérieur. Beaucoup de systèmes religieux humains proviennent de formules issues de l'intellect humain, mais le fait d'avoir conscience de Dieu ne fait pas nécessairement partie de ces absurdes systèmes d'esclavage religieux.
Dieu n'est pas la simple invention de l'idéalisme humain; il est la source même de tous les discernements et de toutes les valeurs superanimales de ce genre. Dieu n'est pas une hypothèse formulée pour unifier les concepts humains de vérité, de beauté et de bonté; il est la personnalité d'amour de qui toutes ces manifestations de l'univers sont issues. La vérité, la beauté et la bonté du monde des êtres humains sont unifiées par la spiritualité croissante de l'expérience des mortels qui s'élèvent vers les réalités du Paradis. On ne peut réaliser l'unité de la vérité, de la beauté et de la bonté que dans l'expérience spirituelle de la personnalité connaissant Dieu.
La moralité est l'indispensable base préexistante de la conscience personnelle de Dieu, de la réalisation personnelle de la présence intérieure de l'Ajusteur, mais cette moralité n'est ni la source de l'expérience religieuse, ni la clairvoyance spirituelle qui en résulte. La nature morale est superanimale mais subspirituelle. La moralité équivaut à reconnaître le devoir, à la réalisation de l'existence de ce qui est juste et de ce qui ne l'est pas. La zone morale s'interpose entre le type de mental animal et le type de mental humain, de même que la morontia fonctionne entre les sphères matérielles et spirituelles d'aboutissement de la personnalité.
Le mental évolutionnaire est capable de découvrir la loi, la morale et l'éthique, mais c'est l'Ajusteur intérieur, l'esprit effusé, qui révèle au mental humain évoluant le législateur, le Père-source de tout ce qui est vrai, beau et bon. Un être humain ainsi éclairé possède une religion; il est spirituellement équipé pour entreprendre la longue et aventureuse recherche de Dieu.
La moralité n'est pas nécessairement spirituelle; elle peut être entièrement et purement humaine, bien que la véritable religion rehausse toutes les valeurs morales et les rende plus significatives. La moralité sans religion ne réussit ni à révéler la bonté ultime, ni à assurer la survie des valeurs morales, même des siennes propres. La religion permet de rehausser et de glorifier tout ce que la morale reconnaît et approuve, et elle permet d'en assurer la survie.
La religion se tient au-dessus de la science, de l'art, de la philosophie, de l'éthique et de la morale, mais sans en être indépendante. Toutes sont indissolublement liées dans l'expérience humaine personnelle et sociale. La religion est l'expérience suprême de l'être humain dans sa nature de mortel, mais le caractère fini du langage rend impossible à la théologie de jamais dépeindre d'une manière appropriée l'expérience religieuse réelle.
La clairvoyance religieuse possède le pouvoir de transformer une défaite en désirs supérieurs et en nouvelles déterminations. L'amour est la motivation la plus élevée que l'être humain puisse utiliser dans son ascension de l'univers. Mais, quand l'amour est dépouillé de vérité, de beauté et de bonté, il n'est que sentiment, déformation philosophique, illusion psychique et tromperie spirituelle. L'amour doit toujours être défini à nouveau sur les niveaux successifs de la progression morontielle et spirituelle.
L'art est issu de la tentative de l'être humain pour échapper au manque de beauté de son entourage matériel; il est un geste vers le niveau morontiel. La science est l'effort de l'être humain pour résoudre les énigmes apparentes de l'univers matériel. La philosophie est sa tentative pour unifier l'expérience humaine. La religion est le geste suprême de l'être humain magnifiquement tendu vers la réalité finale, sa détermination de trouver Dieu et d'être semblable à lui.
Dans le domaine de l'expérience religieuse, les possibilités spirituelles sont des réalités potentielles. La poussée humaine en avant n'est pas une illusion psychique. Toutes les fabulations des êtres humains au sujet de l'univers peuvent ne pas correspondre à des faits, mais elles contiennent une grande, une très grande partie de vérité.
La vie de certains êtres humains est trop grande et noble pour descendre au bas niveau d'une simple réussite. L'animal doit s'adapter à son environnement, mais l'être humain religieux transcende son environnement; il échappe ainsi aux limitations du présent monde matériel par la clairvoyance de l'amour divin. Ce concept de l'amour engendre dans l'âme de l'être humain l'effort superanimal pour trouver la vérité, la beauté et la bonté; et quand il les trouve effectivement, il est glorifié dans leur étreinte; il est consumé du désir de les vivre et d'agir selon la droiture.
Ne vous découragez pas; l'évolution humaine est encore en cours de progrès, et la révélation de Dieu au monde, en Jésus et par Jésus, ne fera pas défaut.
Le grand défi lancé à l'être humain moderne consiste à établir de meilleures communications avec le divin Moniteur qui habite le mental humain. La plus grande aventure de l'être humain dans la chair est son effort sain et équilibré pour repousser les frontières de la conscience de soi à travers les domaines imprécis de la conscience embryonnaire de l'âme, dans un effort sincère pour atteindre la région frontière de la conscience de l'esprit – le contact avec la divine présence. Une telle expérience constitue la conscience de Dieu, c'est une expérience qui confirme puissamment la vérité préexistante de l'expérience religieuse consistant à connaître Dieu. Cette conscience de l'esprit équivaut à connaître effectivement la filiation avec Dieu. À défaut, l'assurance de cette filiation est l'expérience de la foi.
La conscience de Dieu est l'équivalent de l'intégration du moi à l'univers sur ses niveaux les plus élevés de réalité spirituelle. Seul le contenu spirituel d'une valeur quelconque est impérissable. Même ce qui est vrai, beau et bon ne saurait périr dans l'expérience humaine. Si l'être humain ne choisit pas de survivre, alors l'Ajusteur survivant conserve ces réalités nées de l'amour et nourries dans le service. Et toutes ces choses font partie du Père Universel. Le Père est amour vivant, et cette vie du Père est dans ses Fils et ses Filles. Et l'esprit du Père est dans les fils et les filles de ses Fils et ses Filles – les êtres humains mortels. Quand tout est dit et fait, l'idée de Père et de la Mère divine reste encore le concept humain le plus élevé de Dieu.
La vie de Jésus dans la chair dépeint une croissance religieuse transcendante, commençant par les idées anciennes de crainte primitive et de respect humain, continuant par des années de communion spirituelle personnelle et parvenant finalement au statut supérieur et exalté de la conscience de son unité avec le Père. Ainsi, en une seule courte vie, Jésus franchit l'expérience de la progression spirituelle religieuse que les êtres humains commencent sur Terre et n'achèvent généralement qu'à la fin de leur long séjour dans les écoles d'éducation spirituelle des niveaux successifs de la carrière pré-paradisiaque. Jésus progressa à partir d'une conscience purement humaine des certitudes de la foi, fruit de l'expérience religieuse personnelle, jusqu'aux hauteurs spirituelles sublimes de la réalisation positive de sa nature divine et jusqu'à la prise de conscience de son association étroite avec le Père Universel dans la direction d'un univers. Il progressa depuis l'humble statut de dépendance humaine, qui l'avait incité à répondre spontanément à l'interlocuteur qui l'appelait Bon Maitre : “ Pourquoi m'appelles-tu bon ? Nul n'est bon sinon Dieu, ” jusqu'à la conscience sublime de sa divinité parachevée, qui le conduisit à s'écrier : “ Qui d'entre vous me convaincra de péché ? ” Et cette ascension progressive de l'humain au divin fut purement l'accomplissement d'un mortel. Et, lorsque Jésus eut ainsi atteint la divinité, il était encore le même Jésus humain, le Fils de l'Homme aussi bien que le Fils de Dieu.
Marc, Matthieu et Luc gardent quelque chose du portrait du Jésus humain se lançant dans la magnifique lutte pour connaître la volonté divine et pour exécuter cette volonté. Jean présente un portrait du triomphant Jésus marchant sur Terre avec la pleine conscience de sa divinité. La grande erreur commise par ceux qui ont étudié la vie du Maitre est que certains ont conçu Jésus comme entièrement humain, tandis que d'autres l'ont imaginé comme uniquement divin. Durant toute son expérience, il fut véritablement à la fois humain et divin, comme il l'est encore maintenant.
Mais la plus grande erreur consista en ceci : Alors que le Jésus humain était reconnu comme ayant une religion, le Jésus divin (le Christ) devint une religion presque du jour au lendemain. Le christianisme de Paul assura l'adoration du divin Christ, mais perdit à peu près complètement de vue le Jésus humain de Galilée luttant vaillamment et qui, par la vaillance de sa foi religieuse personnelle et l'héroïsme de son Ajusteur intérieur, s'éleva des humbles niveaux de l'humanité pour devenir un avec la divinité, devenant ainsi le chemin nouveau et vivant par lequel tous les mortels peuvent effectuer la même ascension depuis l'humanité jusqu'à la divinité. Les mortels, à tous les stades de spiritualité et sur tous les mondes, peuvent trouver dans la vie personnelle de Jésus ce qui les fortifiera et les inspirera pendant qu'ils progressent des niveaux spirituels les plus bas aux valeurs divines les plus élevées, depuis le commencement jusqu'à la fin de toute expérience religieuse personnelle.
À l'époque où fut écrit le Nouveau Testament, les auteurs croyaient profondément non seulement à la divinité du Christ ressuscité, mais ils croyaient aussi pieusement et sincèrement à son retour immédiat sur Terre pour parfaire la fraternité spirituelle. Cette foi solide dans le retour immédiat du Seigneur contribua beaucoup à faire omettre, dans le récit, les références qui dépeignaient les expériences et les attributs purement humains du Maitre. Tout le mouvement chrétien eut tendance à s'écarter du portrait humain de Jésus de Nazareth pour s'orienter vers l'exaltation du Christ ressuscité, le Seigneur Jésus-Christ glorifié qui devait bientôt revenir.
Jésus fonda la religion de l'expérience personnelle en faisant la Volonté de Dieu et en servant la fraternité humaine. Paul fonda une religion où Jésus glorifié devenait l'objet d'adoration, et où la fraternité se composait de compagnons croyant au divin Christ. Ces deux concepts existaient potentiellement dans la vie divine-humaine de Jésus durant son effusion, et il est vraiment dommage que ses disciples n'aient pas réussi à créer une religion unifiée qui aurait dument reconnu à la fois la nature humaine et la nature divine du Maitre, telles qu'elles étaient inséparablement liées dans sa vie terrestre et si glorieusement exposées dans l'évangile originel du royaume.
Vous ne seriez ni choqué ni troublé par certaines vigoureuses proclamations de Jésus si vous vouliez seulement vous rappeler qu'il était l'être humain religieux le plus sincère et le plus dévoué du monde. Il était un mortel entièrement consacré, voué sans réserve à faire la volonté de son Père. Beaucoup de ses sentences apparemment dures représentaient plutôt une profession personnelle de foi et un engagement de dévotion que des commandements à ses disciples. Et ce furent précisément cette unité de dessein et sa dévotion désintéressée qui lui permirent de faire, en une courte vie, des progrès aussi extraordinaires dans la conquête du mental humain. Beaucoup de ses déclarations devraient être considérées comme des confessions de ce qu'il exigeait de lui-même plutôt que comme des exigences imposées à tous ses disciples. Dans sa dévotion à la cause du royaume, Jésus brula tous les ponts derrière lui; il sacrifia tout ce qui était un obstacle à l'exécution de la volonté de son Père.
Jésus bénissait les pauvres parce qu'ils étaient généralement sincères et pieux; il condamnait les riches parce qu'ils étaient généralement libertins et impies. Mais il condamnait aussi les pauvres quand ils étaient impies, et louait les êtres humains fortunés quand ils étaient pieux et consacrés.
Jésus amenait les êtres humains à se sentir chez eux dans le monde; il les délivrait de l'esclavage des tabous et leur enseignait que le monde n'est pas fondamentalement mauvais. Il n'aspirait pas à échapper à sa vie terrestre. Durant sa vie dans la chair, il maitrisa une technique pour faire la volonté de son Père d'une manière qui fut agréable à ce Père. Il atteignit une vie religieuse idéaliste au milieu d'un monde réaliste. Jésus ne partageait pas le point de vue pessimiste de Paul sur l'humanité. Le Maitre considérait les êtres humains comme fils et filles de Dieu et prévoyait un avenir éternel et magnifique pour tous ceux qui choisiraient de survivre. Il n'était pas un sceptique moral; il regardait l'être humain positivement et non négativement. Il considérait la plupart des êtres humains comme faibles plutôt que mauvais, désaxés plutôt que dépravés. Mais quel que fût leur statut, ils étaient tous les enfants de Dieu et ses frères et soeurs.
Il enseigna aux êtres humains à s'attribuer une haute valeur dans le temps et dans l'éternité. À cause de cette haute estime que Jésus avait pour les êtres humains, il était prêt à se dépenser au service assidu de l'humanité. Et c'était cette valeur infinie qu'il attribuait au fini qui faisait de la règle d'or un facteur essentiel de sa religion. Quel mortel ne serait pas soulevé par la foi extraordinaire que Jésus a en lui ?
Jésus n'offrit pas de règles pour le progrès social. Sa mission était religieuse, et la religion est une expérience exclusivement individuelle. Le but ultime de la société dans son accomplissement le plus avancé ne peut jamais espérer transcender la fraternité des êtres humains fondée sur la reconnaissance de la paternité de Dieu enseignée par Jésus. L'idéal de tout aboutissement social ne peut être réalisé que par la venue de ce royaume divin.
L'expérience religieuse personnelle, spirituelle, résout efficacement la plupart des difficultés des mortels; elle sélectionne, évalue et ajuste tous les problèmes humains. La religion n'écarte ni ne supprime les ennuis humains, mais elle les dissout, les absorbe, les illumine et les transcende. La véritable religion unifie la personnalité pour qu'elle s'ajuste efficacement à toutes les nécessités des mortels. La foi religieuse – la gouverne positive de la divine présence intérieure – permet infailliblement à l'être humain qui connaît Dieu de jeter un pont sur l'abime qui existe entre d'une part la logique intellectuelle qui reconnaît la Première Cause Universelle comme étant Cela, et d'autre part les affirmations positives de l'âme qui déclarent que cette première cause est Lui, le Père céleste de l'évangile de Jésus, le Dieu personnel du salut humain.
Il n'y a que trois éléments dans la réalité universelle : le fait, l'idée et la relation. La conscience religieuse identifie ces réalités en tant que science, philosophie et vérité. La philosophie aurait tendance à considérer ces activités comme la raison, la sagesse et la foi – la réalité physique, la réalité intellectuelle et la réalité spirituelle. Nous avons l'habitude d'appeler ces réalités choses, significations et valeurs.
La compréhension progressive de la réalité équivaut à s'approcher de Dieu. La découverte de Dieu, la conscience d'être identique à la réalité, équivaut à éprouver le parachèvement de soi – le soi entier, la totalité de soi. L'expérience de la réalité totale est la pleine réalisation de Dieu, la finalité de l'expérience de la connaissance de Dieu.
Le résumé complet de la vie humaine consiste à savoir que l'être humain est éduqué par le fait, ennobli par la sagesse et sauvé – justifié – par la foi religieuse.
La certitude physique consiste en la logique de la science; la certitude morale, en la sagesse de la philosophie; la certitude spirituelle, en la vérité de l'expérience religieuse authentique.
Le mental humain peut atteindre de hauts niveaux de clairvoyance spirituelle et les sphères correspondantes de divinité des valeurs, parce qu'il n'est pas entièrement matériel. Il existe un noyau d'esprit dans le mental de l'être humain – l'Ajusteur de la présence divine. Il y a trois preuves distinctes que cet esprit habite le mental humain :
Le mental humain ne crée pas de valeurs réelles; l'expérience humaine ne procure pas la clairvoyance de l'univers. En ce qui concerne la clairvoyance, la récognition des valeurs morales et le discernement des significations spirituelles, tout ce que le mental humain peut faire consiste à découvrir, reconnaître, interpréter et choisir.
Les valeurs morales de l'univers deviennent des acquis intellectuels par l'exercice des trois jugements, ou choix fondamentaux, du mental des mortels :
- Le jugement de soi – le choix moral.
- Le jugement social – le choix éthique.
- Le jugement de Dieu – le choix religieux.
Si un amant divin ne vivait pas en lui, l'être humain ne pourrait aimer généreusement et spirituellement. Si un interprète ne vivait pas dans son mental, l'être humain ne pourrait pas vraiment se rendre compte de l'unité de l'univers. Si un estimateur ne demeurait pas en lui, l'être humain serait dans l'impossibilité d'apprécier les valeurs morales et de reconnaître les significations spirituelles. Or, cet amant divin vient de la source même de l'amour infini; cet interprète est une fraction de l'Unité Universelle; cet estimateur est l'enfant du Centre-Source de toutes les valeurs absolues de la réalité éternelle et divine.
L'évaluation morale avec une signification religieuse – la clairvoyance spirituelle – implique le choix individuel entre le bien et le mal, la vérité et l'erreur, le matériel et le spirituel, l'humain et le divin, le temps et l'éternité. La survie humaine dépend, dans une grande mesure, de la consécration de la volonté humaine à choisir les valeurs triées par le sélecteur des valeurs spirituelles – l'interprète et l'unificateur intérieur. L'expérience religieuse personnelle comporte deux phases : la découverte dans le mental humain, et la révélation par le divin esprit intérieur. Par un excès de raisonnements sophistiqués ou par suite de la conduite impie de personnes prétendument religieuses, il se peut qu'un être humain, ou même une génération d'êtres humains suspende ses efforts pour découvrir le Dieu qui les habite; ces êtres humains peuvent cesser de progresser et ne pas aboutir à la révélation divine. Mais de telles attitudes dépourvues de progrès spirituel ne peuvent durer longtemps à cause de la présence et de l'influence des Ajusteurs de Pensée.
Cette profonde expérience de la réalité de la présence divine intérieure transcende pour toujours la grossière technique matérialiste des sciences physiques. On ne peut ni mettre la joie spirituelle sous un microscope, ni peser l'amour dans une balance, ni mesurer les valeurs morales; et l'on ne peut pas non plus chiffrer la qualité de l'adoration spirituelle.
Les Hébreux avaient une religion de sublimité morale. Les Grecs élaborèrent une religion de beauté. Paul et ses confrères fondèrent une religion de foi, d'espérance et de charité. Jésus révéla une religion d'amour et en donna l'exemple : la sécurité dans l'amour du Père, avec la joie et la satisfaction résultant du partage de cet amour au service de la fraternité humaine.
Chaque fois qu'un être humain fait un choix moral réfléchi, il fait immédiatement l'expérience d'une nouvelle invasion divine de son âme. Le choix moral constitue la religion en tant que mobile de réaction intérieure aux conditions extérieures. Mais cette religion réelle n'est pas une expérience purement subjective. Elle signifie que l'ensemble subjectif de l'individu est engagé dans une réaction significative et intelligente à l'objectivité totale – à l'univers et à son Auteur.
Ce n'est pas parce que l'expérience exquise et transcendantale d'aimer et d'être aimé est si purement subjective qu'elle n'est qu'une illusion psychique. La seule réalité vraiment divine et objective qui soit associée aux êtres mortels, l'Ajusteur de Pensée, fonctionne apparemment, pour l'observation humaine, comme un phénomène exclusivement subjectif. Le contact de l'être humain avec Dieu, la réalité objective la plus haute, ne s'effectue que par l'expérience purement subjective de le connaître, de l'adorer et de réaliser la filiation avec lui.
La véritable adoration religieuse n'est pas un futile monologue où l'on se trompe soi-même. L'adoration est une communion personnelle avec ce qui est divinement réel, avec ce qui est la source même de la réalité. Par l'adoration, l'être humain aspire à devenir meilleur et, par elle, il finit par atteindre le meilleur.
L'idéalisation de la vérité, de la beauté et de la bonté, et la tentative de les servir ne sont pas un substitut à l'expérience religieuse authentique – la réalité spirituelle. La psychologie et l'idéalisme ne sont pas l'équivalent de la réalité religieuse. Les projections de l'intellect humain peuvent, il est vrai, donner naissance à de faux dieux – des dieux à l'image de l'être humain – mais le fait d'avoir véritablement conscience de Dieu n'a pas cette origine; la conscience de Dieu réside dans l'esprit intérieur. Beaucoup de systèmes religieux humains proviennent de formules issues de l'intellect humain, mais le fait d'avoir conscience de Dieu ne fait pas nécessairement partie de ces absurdes systèmes d'esclavage religieux.
Dieu n'est pas la simple invention de l'idéalisme humain; il est la source même de tous les discernements et de toutes les valeurs superanimales de ce genre. Dieu n'est pas une hypothèse formulée pour unifier les concepts humains de vérité, de beauté et de bonté; il est la personnalité d'amour de qui toutes ces manifestations de l'univers sont issues. La vérité, la beauté et la bonté du monde des êtres humains sont unifiées par la spiritualité croissante de l'expérience des mortels qui s'élèvent vers les réalités du Paradis. On ne peut réaliser l'unité de la vérité, de la beauté et de la bonté que dans l'expérience spirituelle de la personnalité connaissant Dieu.
La moralité est l'indispensable base préexistante de la conscience personnelle de Dieu, de la réalisation personnelle de la présence intérieure de l'Ajusteur, mais cette moralité n'est ni la source de l'expérience religieuse, ni la clairvoyance spirituelle qui en résulte. La nature morale est superanimale mais subspirituelle. La moralité équivaut à reconnaître le devoir, à la réalisation de l'existence de ce qui est juste et de ce qui ne l'est pas. La zone morale s'interpose entre le type de mental animal et le type de mental humain, de même que la morontia fonctionne entre les sphères matérielles et spirituelles d'aboutissement de la personnalité.
Le mental évolutionnaire est capable de découvrir la loi, la morale et l'éthique, mais c'est l'Ajusteur intérieur, l'esprit effusé, qui révèle au mental humain évoluant le législateur, le Père-source de tout ce qui est vrai, beau et bon. Un être humain ainsi éclairé possède une religion; il est spirituellement équipé pour entreprendre la longue et aventureuse recherche de Dieu.
La moralité n'est pas nécessairement spirituelle; elle peut être entièrement et purement humaine, bien que la véritable religion rehausse toutes les valeurs morales et les rende plus significatives. La moralité sans religion ne réussit ni à révéler la bonté ultime, ni à assurer la survie des valeurs morales, même des siennes propres. La religion permet de rehausser et de glorifier tout ce que la morale reconnaît et approuve, et elle permet d'en assurer la survie.
La religion se tient au-dessus de la science, de l'art, de la philosophie, de l'éthique et de la morale, mais sans en être indépendante. Toutes sont indissolublement liées dans l'expérience humaine personnelle et sociale. La religion est l'expérience suprême de l'être humain dans sa nature de mortel, mais le caractère fini du langage rend impossible à la théologie de jamais dépeindre d'une manière appropriée l'expérience religieuse réelle.
La clairvoyance religieuse possède le pouvoir de transformer une défaite en désirs supérieurs et en nouvelles déterminations. L'amour est la motivation la plus élevée que l'être humain puisse utiliser dans son ascension de l'univers. Mais, quand l'amour est dépouillé de vérité, de beauté et de bonté, il n'est que sentiment, déformation philosophique, illusion psychique et tromperie spirituelle. L'amour doit toujours être défini à nouveau sur les niveaux successifs de la progression morontielle et spirituelle.
L'art est issu de la tentative de l'être humain pour échapper au manque de beauté de son entourage matériel; il est un geste vers le niveau morontiel. La science est l'effort de l'être humain pour résoudre les énigmes apparentes de l'univers matériel. La philosophie est sa tentative pour unifier l'expérience humaine. La religion est le geste suprême de l'être humain magnifiquement tendu vers la réalité finale, sa détermination de trouver Dieu et d'être semblable à lui.
Dans le domaine de l'expérience religieuse, les possibilités spirituelles sont des réalités potentielles. La poussée humaine en avant n'est pas une illusion psychique. Toutes les fabulations des êtres humains au sujet de l'univers peuvent ne pas correspondre à des faits, mais elles contiennent une grande, une très grande partie de vérité.
La vie de certains êtres humains est trop grande et noble pour descendre au bas niveau d'une simple réussite. L'animal doit s'adapter à son environnement, mais l'être humain religieux transcende son environnement; il échappe ainsi aux limitations du présent monde matériel par la clairvoyance de l'amour divin. Ce concept de l'amour engendre dans l'âme de l'être humain l'effort superanimal pour trouver la vérité, la beauté et la bonté; et quand il les trouve effectivement, il est glorifié dans leur étreinte; il est consumé du désir de les vivre et d'agir selon la droiture.
Ne vous découragez pas; l'évolution humaine est encore en cours de progrès, et la révélation de Dieu au monde, en Jésus et par Jésus, ne fera pas défaut.
Le grand défi lancé à l'être humain moderne consiste à établir de meilleures communications avec le divin Moniteur qui habite le mental humain. La plus grande aventure de l'être humain dans la chair est son effort sain et équilibré pour repousser les frontières de la conscience de soi à travers les domaines imprécis de la conscience embryonnaire de l'âme, dans un effort sincère pour atteindre la région frontière de la conscience de l'esprit – le contact avec la divine présence. Une telle expérience constitue la conscience de Dieu, c'est une expérience qui confirme puissamment la vérité préexistante de l'expérience religieuse consistant à connaître Dieu. Cette conscience de l'esprit équivaut à connaître effectivement la filiation avec Dieu. À défaut, l'assurance de cette filiation est l'expérience de la foi.
La conscience de Dieu est l'équivalent de l'intégration du moi à l'univers sur ses niveaux les plus élevés de réalité spirituelle. Seul le contenu spirituel d'une valeur quelconque est impérissable. Même ce qui est vrai, beau et bon ne saurait périr dans l'expérience humaine. Si l'être humain ne choisit pas de survivre, alors l'Ajusteur survivant conserve ces réalités nées de l'amour et nourries dans le service. Et toutes ces choses font partie du Père Universel. Le Père est amour vivant, et cette vie du Père est dans ses Fils et ses Filles. Et l'esprit du Père est dans les fils et les filles de ses Fils et ses Filles – les êtres humains mortels. Quand tout est dit et fait, l'idée de Père et de la Mère divine reste encore le concept humain le plus élevé de Dieu.